Amilcar... la marque

Elle est née de la rencontre de deux hommes qui sont à la base de cette page d'’histoire automobile : André Morel et Edmond Moyet et deux hommes d’affaire : Emile Akar et Joseph Lamy.

André Morel est embauché en 1918 par la société Le Zèbre comme responsable des ventes pour la moitié sud de la France.

Né à Troyes le 3 août 1884, il travaille à 16 ans comme manutentionnaire aux halles à Paris, avant de devenir apprenti chez Corre à Levallois qui le prend comme mécano au tour de France automobile. Il travaille ensuite à Lyon, haut lieu automobile de l’époque chez un négociant de voitures d’occasion, où il se fait vite débaucher par un des collaborateurs de Marius Berliet. A 20 ans il pilote et teste les châssis de 40 chevaux et autobus Berliet dont il devient très vite le meilleur essayeur. Pendant la première guerre mondiale il s’engage dans l’aviation et il devient rapidement pilote d’avion. Il se retrouve après la fin du conflit 14-18 chez Le Zèbre, mais avec les difficultés économiques de l’après guerre il doit y gérer une situation très difficile.

Quant à Edmond Moyet il est un collaborateur de Jules Salomon chez Citroën sur le projet de la 5 CV. C’est un homme passionné qui travaille le soir à son domicile sur son projet personnel : la construction d’un cyclecar. Ce projet est bien avancé et il se demande comment concrétiser la réalisation de sa voiture, il est donc à la recherche de partenaires financiers.

La providence lui fait rencontrer André Morel et les deux hommes se retrouvent au restaurant "EXCELSIOR". Ils dessinent les premiers croquis de la voiture sur un coin de nappe dès la fin du repas. (L'EXCELSIOR était alors une Brasserie de la Porte Maillot où avaient l'habitude de se retrouver les grands noms de l’automobile et beaucoup d'amateurs constructeurs).

Mais il manque ce qui fait toujours défaut, les capitaux. André Morel met alors le jeune ingénieur en relation avec

Emile Akar qui détient des capitaux importants chez Le Zèbre et Joseph Lamy qui en est le directeur commercial.

Les deux hommes sont conquis par le projet d’Edmond Moyet qui est très avancé et ils acceptent de construire le cyclecar en créant une nouvelle société.

La voiture est mise en construction dans des ateliers au 34 rue du Chemin Vert dans le 11ème à Paris, derrière la Bastille. Elle portera le nom d’Amilcar : l'anagramme des noms des deux dirigeants Lamy et Akar, ce nom est déposé le 19 juillet 1921 au greffe du tribunal de commerce de la Seine

De nombreuses autres versions ont couru sur l'origine du nom Amilcar. Certains y ont même vu un jeu de mot britannique : " A Lamy Car " (une voiture de Lamy).

Emile Akar se retire de la société Le Zèbre pour devenir le directeur général de la SNPA. Joseph Lamy et André Morel démissionnent eux aussi de chez Le Zèbre pour intégrer la nouvelle équipe. Joseph Lamy supervise la partie commerciale de l’affaire, André Morel est nommé responsable des ventes et Edmond Moyet ingénieur en chef..

Pour boucler le montage financier et augmenter le capital de la société, ils associent les agents qui représentent Le Zèbre avec à leur tête Dumond de Lyon, agent de nombreuses marques automobiles : Delaunay Belleville, Lorraine-Dietrich, Talbot-Darracq et bien sûr …Le Zèbre ! .

Les statuts de « La Société Nouvelle pour l’Automobile Amilcar » sont déposés le 29 septembre 1921 et toujours est-il qu’en octobre 1921 trois châssis sont prêts et exposés au salon de l’automobile au Grand Palais.

Quelques jours plus tard, le premier cyclecar de la marque roule et même roule fort bien puisque André Morel remporte sa catégorie, au volant d’une des toutes premières Amilcar, à plus de 90 km/h, le kilomètre lancé à Lyon le 23 octobre 1921.

C’est le début d’un fabuleux palmarès pour Amilcar et d’une très grande carrière de pilote pour André Morel.

Naissance du cyclecar

Au début des années vingt, la France sort péniblement de la guerre et l'industrie cherche de nouveaux débouchés. Parmi eux, l'automobile dont tous les français commencent à rêver. L'état donne un premier coup de pouce à l'idée de voiture populaire en créant par la loi de finances du 30 juillet 1920 la réglementation sur les « cyclecars » qui réduit à 100 francs la taxe annuelle de cette nouvelle catégorie de petites voitures, moins taxées que les véritables automobiles. Pour bénéficier de cette catégorie, un cyclecar doit répondre précisément à certains critères, en voici la définition officielle:

Cette limite de poids ne concerne pas divers accessoires : lanternes ou phares, roue de secours, démarreur, ..., et ne s'applique pas au poids des passagers !
De nombreux constructeurs vont se lancer dans la fabrication de cyclecars, donnant libre cours à leur imagination avec des créations originales et simplistes, bien souvent résultantes d'un compromis entre le motocycle et la voiturette. On peut classer en deux catégories les constructeurs de cyclecars :

Evolution du cyclecar

La fin de l'âge d'or du cyclecar

Une nouvelle loi de finances en avril 1924 augmente l'impôt annuel du cyclecar de 100 à 120 francs et abaisse celui des voiturettes à 180 francs. C'est le déclin du cyclecar et les grandes marques font évoluer leurs modèles dans la catégorie voiturette pour éviter la contrainte de la limite de poids de 350kg. En 1925, la loi de finances supprime la catégorie cyclecar qui est rattachée au même régime fiscale que les autres automobiles.

Amilcar et le cyclecar

Dés 1923, la chronique du cyclecar ne concerne plus Amilcar, dont tous les modèles du fait de l'augmentation du poids ne peuvent plus être considérés comme des cyclecar. La dénomination « cyclecar » restera longtemps dans le vocabulaire automobile des années vingt pour désigner familièrement un véhicule sportif et léger.

Les fondateurs

Emile Akar (1876-1940)

Emile Akar

Fils dun petit industnel en confection, Emile Akar a trois frères, ce sont tous des brasseurs d'affaires. Avant la guerre, Emile Akar possède une société de transport hippomobile à Paris.

À la déclaration de guerre, tous ses chevaux sont réquisitionnés.

Pendant la guerre 1914-1918, Emile organise la réfection des vêtements militaires et ce avec un tel succès qu'en 1935 le directeur de l'Intendance viendra le consulter.

Ancien élève de l’Ecole des Hautes Etudes Commerciales, il entre dans les affaires de son beau-père M. Albert Cahen qui après avoir vendu des paquets de café avec une petite voiture à bras dans Les rues de Paris est à la tête d'une entreprise florissante. I possède une importante usine de torréfaction et une chaîne de magasins à succursales multiples dans toute la France a l'enseigne du « Planteur de Caïffa ».

Emile Akar ne s'intéresse pas qu'aux cafés de son beau-père, il prend une participation financière dans la société « Le Zebre » de laquelle il ne se retire que pour fonder Amilcar ou il prend le titre de directeur général.

Si Lamy est en partie à l'origine du projet et apporte le noyau technique (Moyet, Morel...) Akar amène le montage financier de l'affaire.

Tout en supervisant Amilcar à laquelle il s'intéresse beaucoup (c'est lui qui y fera entrer Marcel Sée). il s'occupe de nombreuses autres affaires, il est administrateur de plusieurs sociétés.

Emile Akar aime beaucoup le luxe et les mondanités. Ami intime d'André Citroën et de nombreux notables, il est également passionné de chasse à tir et possède une propriété en Sologne.

Au début de l'affaire Amilcar, il habite un petit hôtel particulier rue Berlioz a Paris, mais dés les premiers succès. il s'installe dans une très belle demeure près du Grand Palais. Il aime les voitures de luxe et, à côté de ses inévitables Amilcar, on VA lui connaître successivement une Voisin, une Chrysler, une Hispano. Son vieux chauffeur est un familier de l'usine.

Lors de son éviction d'Amilcar en 1927, Emile Akar vend une grande partie de ses biens pour dédommager ses créanciers, retourne à ses anciennes affaires et confirme son esprit d’entrepnse en en créant de nouvelles.

Joseph Lamy (1881-1947)

Joseph Lamy

Tout Aussi entreprenant que son associé, Joseph Lamy est le fils aîné d’une famille nombreuse et peu argentée de cultivateurs. Il naît en 1881 à Courtomer dans l’Orne.

À 19 ans. il part en Russie pour gagner sa vie. Il apprend le russe en quelques mois et devient professeur de français à l'Université de Saint Petershourg Parallèlement, il est correspondant de l'Ouest Eclair, journal pour lequel il effectue plusieurs reportages dont un voyage en Transsibérien jusqu’en Macédoine et en Corée.

Il rentre en France vers 1908, devient directeur des taxis de Monaco, puis il entre aux automobiles « Le Zèbre » (rue Villarest de Joyeuse à Paris) en tant que directeur commercial ou il y investira par la suite un certain capital.

En 1921, il fait donc alliance avec Emile Akar pour fonder Amilcar. Si son associé est le financier de la société, pour sa part il supervise la partie commerciale de l'affaire.

Il va vivre une période de grande prospérité et être en relation avec les célébrités de l'époque qui font l'acquisition d'une voiture de la marque : le roi Carol de Roumanie ou le roi d'Espagne Alphonse XI!

Administrateur délégué d'Amicar, il gagne 300 000 francs or par an en 1925. Son train de vie reste néanmoins modeste et il consacre une partie de ses revenus à des libéralités en faveur de son village natal auquel il reste très attaché et dont il est devenu maire. Cet homme dynamique a l'esprit d'entreprise, crée dans les années 21-23, en marge de ses activités industrielles, un restaurant boîte de nuit le «Grand Teddy» 24. rue Caumartin à Paris Ce fut l'établissement à la mode fréquenté par le « Tout-Panis » des années 20.

Lorsqu'il quitte Amilcar en 1927, Joseph Lamy devient concessionnaire Hudson et Essex jusqu'en 1935, son ancien pilote Morel le rejoignant quelque temps pour participer au Tour de Fran- ce automobile sur Essex en 1929 et sur Hudson en 1931.

De 1935 a 1940, Lamy s'intéresse aux pots d'échappement dépolluants, à l'essence synthétique qui lui fait perdre encore beaucoup d'argent et il nourrit un projet d'exploitation d'une forêt d'hévéas à l'embouchure de l'Amazone.

De 1941 à 1945, il crée une affaire de gazogènes, "Le Français" qui connaît un certain succès et équipe de nombreux camions. Il disparaît en 1947 atteint par la maladie.